Cette année, je participe pour la troisième fois au National Novel Writing Month, un challenge internationale proposant d’écrire un roman de 50 000 mots pendant le mois de Novembre. Mes deux dernières tentatives ont été des réussites, et j’ai beaucoup appris de cette expérience.
Mais cette fois ci, j’ai décidé de me lancer dans un projet un peu fou: un roman à quatre mains, avec ma meilleure amie M L’Imagienne, intitulé (temporairement) Le Vase.
Roberta adore la ville de Paris, son stage d’antiquaire et son patron, Pascal. C’est une vie idéale… jusqu’à ce que Pascal disparaisse sans laisser de traces. Bob, tête brulée professionnelle, décide de se lancer à sa recherche. Et peu importe qu’il ai disparu dans une dimension parallèle en bordure de la réalité, une ville paradoxale où se côtoient anachronismes, paradoxes géographiques, magie ancestrale et sectes fanatiques. Son patron lui avait promis une augmentation, et Bob est bien décidée à le retrouver et lui faire tenir parole.
L’Ombre est un univers que j’avais développé sur un coup d’inspiration il y a un peu plus d’un an, mais dans lequel je n’avais pas prévu d’écrire d’histoire. J’en ai parlé à M, qui a immédiatement été séduite et m’a proposé de collaborer sur l’écriture d’un roman. Il a été très vite évident qu’à deux, les idées fusent plus vite, et surtout sont beaucoup plus créatives (et parfois un peu farfelues). Nous avons très rapidement décidé du concept de base et des grandes lignes de notre histoire, ainsi que de nos personnages principaux.
Mais l’écriture collaborative présente aussi de nombreux challenges. Premièrement, se mettre d’accord sur nos idées. Cela ne nous a heureusement pas posé trop de problème, car nous avons une imagination très similaire; mais il est évident que nous n’avons pas la même vision des lieux et des personnages de l’histoire. Il faut aussi déterminer de manière claire chaque point du scénario. Là où je prépare généralement un fil directeur et quelques scènes pour laisser une large part à l’improvisation dans l’écriture, nous avons du ici planifier chaque détail, chaque péripétie, chaque interaction des personnages, découvertes et révélations. Il y a bien sûr toujours une part d’improvisation et de créativité, car c’est le propre de l’écriture de fiction; mais nous devons toutes les deux savoir dans quelle direction nous allons.
Une fois passée la phase de préparation (écriture de scénario, éléments de world-building, fiches de personnages…), nous avons du nous atteler à un autre problème: le partage de l’écriture. Nous avons choisi une séparation simple du travail: changer de narrateur d’un chapitre à l’autre. L’histoire est donc racontée alternativement du point de vue de Bob, la protagoniste (écrite par M) et de Phil, son ami et guide (écrit par moi).
Le fonctionnement du NaNoWriMo nous pousse à écrire un certain quota de mots chaque jour, de manière spontanée et sans se soucier de l’édition (qui vient plus tard, une fois le premier jet écrit). Cela signifie que nous devons nous adapter à l’écriture de l’une et de l’autre, et suivre la direction des modifications de scénario, des nouveaux éléments intégrés à l’histoire, sans éditer le texte de l’autre. Et surtout, il faut gérer l’avance ou le retard pris par l’une et l’autre sur le calendrier d’écriture. L’ensemble du projet demande une organisation sans faille, une très bonne coopération, et une capacité à s’adapter, improviser et rebondir. Cela force aussi à une certaine perte de contrôle sur sa création, ce qui loin d’être un inconvénient est plutôt une qualité à acquérir.
Ce sont des capacités que je n’avais jamais eu l’occasion de mettre en œuvre dans le domaine de l’écriture de fiction, et c’est une expérience qui jusqu’ici se montre très enrichissante. Outre l’organisation technique, la création est très amusante à deux, et permet l’émergence d’idées nouvelles éloignées de nos zones de confort et de nos clichés d’écriture respectifs. On se rend compte qu’un projet créé à deux est plus que la somme de deux créativités, c’est un hybride unique qui n’aurait pas vu le jour sans la confrontation et la remise en question de points de vue différents. Et il me sera possible plus tard de prendre appui sur des éléments de cette création pour renouveler mon propre style d’écriture.
La rédaction du premier jet n’est pas terminée mais se passe pour l’instant très bien. Il est certain que la phase d’édition nous demandera beaucoup de travail et présentera de nouveaux obstacles à franchir; mais elle nous permettra également de développer de nouvelles qualités et compétences, et d’en apprendre beaucoup l’une sur l’autre et sur nous même.